OLIVIA MARIE DEBACKERE


Chaque petite pierre construit un chemin.

Un voyage intuitif de la couleur au volume

Avant la céramique, la pratique créative d’Olivia Marie Debackere l’emmenait plutôt du côté de la peinture et de la couleur, là où la liberté est seule maîtresse. Après une formation aux Beaux-Arts de Nice et à la prestigieuse Villa Arson, puis une licence d’arts plastiques à l’université d’Aix-en-Provence, elle s’installe à Paris en 2000. Elle travaille en tant que peintre en décors dans le cinéma, avant de devenir restauratrice de fresques anciennes pour les monuments historiques. Mais bientôt, la création lui manque. La céramique, qu’Olivia découvre pendant son temps libre, est un entre-deux qui l’attire : « La création n’est pas aussi libre que la peinture, car la matière décide en partie, mais je m’exprime dans les couleurs, et j’arrive à trouver des formes intéressantes ». C’est dans un atelier de loisir qu’elle apprend les techniques, perfectionne ses gestes et approfondit ses idées. Pour la première fois, elle crée des choses utiles, essentiellement des contenants : bols, saladier, photophores, assiettes, petites coupelles d’art floral d’inspiration japonaise… Plus que tout, c’est la mise en volume de l’objet qui la passionne. Forgeant ainsi un lien unique et profond avec la terre, Olivia décide de suivre cette voie.

À partir de 2010, l’artiste s’engage dans un travail d’approfondissement de son savoir-faire technique afin de maîtriser toutes les subtilités de la céramique. Elle intègre ainsi des résidences dans plusieurs ateliers parisiens de renoms, dont l’atelier IN GIRUM.  En 2014, Olivia intègre l’école des Arts et Techniques Céramiques à Paris. Durant neuf mois d’apprentissage intensif, elle se forme à la technique du tournage, à l’histoire de la céramique, à la connaissance des matériaux ainsi qu’au modelage. Ces différentes disciplines la poussent toujours un peu plus loin dans la réflexion autour de sa pratique. Diplôme de tourneur en poche, Olivia veut aller plus loin. Lassée des émaux industriels qui donnent à ses pièces un rendu trop impersonnel à son goût, elle intègre une première formation aux techniques de recherche de l’émail chez Annie Metzger. Elle découvre alors une science passionnante mêlant chimie, extrême précision et empirisme. Les résultats sont sans appel : la profondeur des couleurs mêlée à une multitude de nuances, les nucléations, les cristallisations et les craquelés lui permettent de préciser ses choix esthétiques. Dorénavant, elle n’utilisera que des émaux artisanaux. S’ensuit la création d’un groupe de recherche et d’expérimentation autour des émaux qui lui confère aujourd’hui une connaissance et une maîtrise approfondie de cette technique.


AU JAPON, LA REDÉCOUVERTE DU TEMPS

Fascinée par la céramique japonaise, Olivia s’envole pour la ville potière de Seto en 2015. C’est en résidence auprès du maître Kato Hiroshige qu’elle se forme pendant plusieurs semaines. Pendant son séjour, la discipline est stricte et le travail acharné, mais il ressort de cette immersion une série de pièces d’un équilibre et d’une délicatesse remarquables. Olivia y découvre l’impressionnante organisation des ateliers japonais - que l’on retrouve aujourd’hui dans son studio - et le sens du détail qui rend possible une pratique créative. Déjà bien formée au tour grâce à ses formations en France, Olivia profite de son séjour pour observer, prendre des notes et s’inspirer de la vie du studio. Elle crée ses propres outils en bambou et apprend auprès des femmes qui emballent les colis. « Il faut pouvoir se permettre de ne rien faire, de faire puis défaire, pour pouvoir avancer sur son identité, mûrir son travail ». Elle y découvre un tout autre rapport au temps et à la pratique artistique, qu’elle s’efforce aujourd’hui de transmettre dans son studio et auprès de ses élèves : « L’art de la céramique, c’est l’art d’apprendre à respecter le temps ».

 

OHOH CERAMIC, UN OASIS AUX PORTES DE PARIS


De retour en France, Olivia ouvre son propre studio : OHOH CERAMIC, dont le nom évoque l’onomatopée préférée d’une assistante du maître Hiroshige. Lorsque l’on pousse la porte de son atelier des Lilas, le temps s’arrête. Un jardin luxuriant nous invite dans un espace de création, véritable immersion dans son quotidien de céramiste, fait de surprises et d’un dialogue constant avec la matière. Olivia crée une poterie poétique, aux formes délicates et aux couleurs douces. Des créations fonctionnelles qui mettent en valeur la chaleur de l’empreinte humaine, en opposition à la perfection froide de l’objet industriel. « Je laisse libre cours à la matière, puis j’accentue son penchant. Je n’ai pas envie de sortir des pièces parfaites. Mon mode d’expression passe par l’imperfection. L’accident donne une part de magie où l’esthétique s’installe ». Une tasse, un bol, une théière ou un vase, autant d’objets uniques qui racontent une histoire personnelle. Celle de sa jeunesse, de son parcours, de ses voyages, qui l’ont sensibilisée au métissage des savoir-faire. En ouvrant un dialogue avec la terre, Olivia façonne de petites séries d’objets fonctionnels aux formes minimales. Elle tient à cette valeur artisanale forte pour des pièces qu’elle veut simples et intemporelles, telles « de petites pierres que l’on tient dans la main ».